Léonie MARTIN, une vie difficile de Marie Baudoin-Croix

Aux éditions Cerf

 

« Réjouissons-nous que ce dix - neuvième siècle ignorait le téléphone ,  sinon nous n'aurions pas à notre disposition ce trésor de la correspondance »nous dit l'auteur de ce livre.En effet , les archives possèdent plus de mille lettres reçues par Léonie et 340 écrites par elle à ses sœurs carmélites .

Il serait étonnant que Léonie soit canonisée : cela ferait beaucoup  dans la famille Martin .Et pourtant . . .Quand on a bien compris qu'il ne faut pas confondre sainteté et perfection ,  ce que le langage courant tend à nous faire croire avec l'expression « je ne suis pas un saint » , mais que la sainteté consiste à vivre là où on est , en faisant fructifier les talents reçus , dans l'amour de Dieu et des autres , en essayant de corriger ses défauts , en persévérant et se relevant après chaque chute , Léonie entre tout à fait dans ce cadre .

Elle a bien mal démarré dans la vie « cette pauvre Léonie » dont l'entourage employait toujours cette expression à son propos. Bébé malingre ,ayant du mal à se développer physiquement et mentalement , atteinte d'un eczéma purulent à un an et demi , enfant quelque peu attardée , au visage disgracieux,complexée vis à vis de ses sœurs douées intellectuellement et au physique agréable,  elle était instable , violente et se comportait avec dureté.Se trouvant si différente elle pensait avoir été changée avec un autre bébé.Quoi que très aimée dans sa famille elle a eu du mal à y trouver sa place suite à la mort d'une petite sœur dont elle était très proche. Elle dira « mon enfance et ma première jeunesse se sont passées dans la souffrance , dans les épreuves les plus cuisantes » A quatorze ans , elle écrit à sa tante proche de la mort « quand vous serez au ciel , demandez au bon Dieu , s'il vous plaît , qu'il me fasse la grâce de me convertir , et aussi qu'il me donne la vocation de devenir une vraie religieuse , car j'y pense tous les jours »

C'est cette « conversion » qu'espère madame Martin qui écrit à Pauline « Léonie est toujours une croix bien lourde à porter ; puisse ta chère tante m'obtenir le changement de cette pauvre enfant »

Il ne faudra pas moins de quatre essais à « cette pauvre Léonie » pour devenir  une « vraie religieuse » c'est à dire selon sa définition réclamée par sa sœur Marie « une religieuse tout à fait bonne et enfin être une sainte »

Elle entrera définitivement à la Visitation de Caen à l'âge de trente sept ans et s'y éteindra à soixante dix huit ans.

 

Docile, Léonie l'est devenue par volonté et elle écrira «  je compte sur l'obéissance qui me fait faire vraiment des merveilles au point que , parfois , je ne me reconnais plus.Aussi j'aime cette vertu plus que je ne pourrais le dire , parce qu'elle me conduit sûrement à l'humilité qui est ma vertu préférée. »Léonie cultivera humilité et douceur jusqu'à sa mort.Pendant plus de soixante ans elle est parvenue à maîtriser sa nature rebelle . Elle a fait siennes les paroles de Thérèse «  Depuis que j'ai compris qu'il m'était impossible de rien faire par moi-même , la tâche ne me parut plus difficile , j'ai senti que l'unique chose nécessaire était de m'unir de plus en plus à Jésus et que le reste me serait donné par surcroît ».