Mt 25, 1-13 : Les vierges folles et les vierges sages : Matthieu 25, 1-13

Enluminure de l’évangéliaire Copte Arabe de la bibliothèque de Fels (1250)

 

Le contexte de la parabole

 

Quand Matthieu écrit vers l’an 80, la communauté Matthéenne doute : le Christ est mort depuis 50 ans, il avait promis qu’il reviendrait rapidement (Mat 24,34 ) et rien ne s’est passé. Et Le découragement guette les chrétiens en proie, en plus,  aux persécutions. 

Matthieu va donc les inviter de façon vigoureuse, brutale même, à la confiance, à la patience, à la vigilance, à l’intelligence par les paraboles qui évoquent la fin des temps.

 

Quelques mots sur les noces Juives :

Le point culminant de la célébration des noces est l’entrée de l’épouse dans la maison de l’époux. Car à ce moment elle devient alors membre de la famille de son mari. Il en découle deux coutumes : 

- un grand festin à lieu dans la maison de l’époux

- l’époux va chercher en cortège, avec des lampes, de la musique, des chants l’épouse pour la ramener chez lui.

Les jeunes filles du village pouvaient se joindre au cortège et être admises au festin sans invitation particulière à condition qu’elles aient un vêtement de fête et leur lampe. 

Dans la parabole, les jeunes filles attendent quelque part entre les deux maisons le passage du cortège.

 

Enluminure de l’évangéliaire Copte Arabe de la bibliothèque de Fels (1250)

Prenons le temps de nous laisser saisir, happer par cette illustration, les couleurs, les arcades du palais, l’ambiance de la scène, les attitudes des personnages, du Christ. 

Quelle impression émane de cette enluminure ? 

Est ce vraiment l’illustration de la parabole que nous venons d’entendre ? 

 

De l’Or partout  Le Royaume 

L’ensemble de l’illustration est saturé d’or: il s’agit en effet du Royaume des Cieux dans lequel baignent les dix jeunes filles, les insouciantes et les prévoyantes ! Elles y ont toutes leurs places. D’ailleurs la parabole ne commence-t-elle pas par : « le royaume des cieux sera semblable à 10 jeunes filles invitées à des noces ». Si nous prêtons attention nous remarquons aussi que toutes portent des auréoles. Étonnant ce royaume ! Rappelons nous que toutes se sont endormies. Comme quoi elles ne sont pas exemplaires, marquées les unes et les autres par leurs limites !

Remarquons aussi que les jeunes filles se ressemblent beaucoup sur l’image !! Elles sont de la même pâte humaine.

 

Le palais 

Au registre supérieur « les jeunes filles sages » entourent le Christ dans une vraie intimité, le visage et le corps penchés dans sa direction. Il existe une véritable communion entre elles et Jésus. Elles portent d’ailleurs leurs lampes comme des calices symboles de leur participation à sa vie divine. Et ce sont elles qui représentent l’épouse absente, l’Église unie au Christ. 

Au registre inférieur, les insouciantes attendent de pouvoir rentrer. La porte  est close. Elles frappent vigoureusement. Au dessus, le Christ, bienveillant les regarde, leur fait signe de patienter en leur rappelant toutefois leur imprévoyance. Elles sont pour l’instant encore séparées de lui.

 

Les lampes

Elles représentent la parole de Dieu :  « Ma parole est une lumière sur ta route » Ps 119. Toutes l’ont reçue . L’huile symbolise la mise en pratique de la Parole dans les œuvres.

Les unes, plus prévoyantes se sont organisées pour être prêtes. D’ailleurs dans l’enluminure leurs lampes les précèdent dans leur rencontre du Christ.

Les lampes des secondes sont renversées, désespérément vides. La Parole n’a pas été suivie d’effet. Symboliquement, c’est maintenant qu’elles vont invitées à se mobiliser enfin pour se procurer de l’huile par elles même.

Cette lecture nous permet aussi de comprendre pourquoi les  « avisées «  ne peuvent pas partager avec leurs amies. Les œuvres sont propres à chacune.

 

Le Christ

Le Christ domine le scène. Son regard compatissant se porte vers celles qui frappent à la porte tout en rappelant son enseignement avec sa main droite. Sa main gauche ne barre pas la porte mais repose seulement sur son montant.

 

Et pour nous ?

Qui que nous soyons, nous serons tous invités à vivre du Christ dans le royaume de Dieu. 

Si la parabole nous invite à la vigilance car, en définitive ce qui comptera à la fin des temps ce sera l’Amour que nous aurons eu les uns pour les autres y compris dans les petites choses de la vie, l’enluminure en propose  une lecture qui n’exclut personne du Royaume.

 

J. Vermot-Gaud  

Le 8 novembre 2020